mardi 6 septembre 2011

Les Français vus par Jean-Jacques...


Comme je l'ai déjà dit et écrit, dans mon travail d'adaptation pour la scène du texte des Confessions, il m'est arrivé bien de fois de couper à regret des passages que j'aurais sans doute pris grand plaisir à dire à mes auditeurs. Celui qui suit fait partie de ceux-là. Je le trouve si singulièrement juste, et encore une fois le jugement de Jean-Jacques est si pertinent - j'ai pu le constater par moi-même bien des fois ces dernières années -, que j'envisage sérieusement de le réintégrer dans mon adaptation du 4ème livre...


" Il faut pourtant rendre justice aux François; ils ne s’épuisent point tant qu’on dit en protestations, et celles qu’ils font sont presque toujours sincéres; mais ils ont une maniére de paroitre s’intéresser à vous qui trompe plus que des paroles. Les gros complimens des Suisses n’en peuvent imposer qu’à des sots. Les maniéres des François sont plus séduisantes en cela même qu’elles sont plus simples; on croiroit qu’ils ne vous disent pas tout ce qu’ils veulent faire, pour vous surprendre plus agréablement. Je dirai plus; ils ne sont point faux dans leurs démonstrations; ils sont naturellement officieux, humains, bienveillans, et même, quoiqu’on en dise, plus vrais qu’aucune autre nation; mais ils sont légers et volages. Ils ont en effet le sentiment qu’ils vous témoignent; mais ce sentiment s’en va comme il est venu. En vous parlant ils sont pleins de vous; ne vous voyent-ils plus, ils vous oublient. Rien n’est permanent dans leur cœur: tout est chez eux l’œuvre du moment. "

Les Confessions, Livre IV

Lecture de Molière (1728), de Jean-François de Troy (collection privée)

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